Martina Dieterle: Dodona. Religionsgeschichtliche und historische Untersuchungen zur Entstehung und Entwicklung des Zeus-Heiligtums (= SPUDASMATA. Studien zur Klassischen Philologie und ihren Grenzgebieten; Bd. 116), Hildesheim: Olms 2007, 450 S., ISBN 978-3-487-13510-6, EUR 78,00
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P. Cabanes écrivait en 1976: "Le sanctuaire de Dodone mériterait, à lui seul, une thèse volumineuse; depuis l'œuvre de C. Carapanos, Dodone et ses ruines, publiée en 1878, le sanctuaire de Zeus Naios n'a jamais fait l'objet d'une étude détaillée; il faut souhaiter que S. I. Dakaris, qui dirige, depuis la disparition de D. Évangélidis, les fouilles de Dodone et qui connaît très bien tous les problèmes que pose ce site archéologique, puisse écrire cet ouvrage lorsque les fouilles qu'il conduit chaque été toucheront à leur terme". Dakaris étant décédé, ainsi que J. Vokotopoulou et A. Ph. Christidis, on ne peut que féliciter M. Dieterle d'avoir eu le courage de se charger de la tâche, sans attendre une hypothétique fin des fouilles, ou une publication encore plus hypothétique du matériel déjà découvert. Il était temps, depuis 1878, de faire le point sur ce que nous pouvons savoir, ou supposer, sur l'histoire du sanctuaire de Dodone.
La composition de l'ouvrage est à la fois originale et pertinente: M. Dieterle a pris le parti de ne pas suivre l'ordre chronologique, mais à l'inverse de remonter le temps. C'était en effet la bonne méthode, car, plus on remonte dans le temps, plus l'histoire du sanctuaire devient obscure, et ce qu'on peut savoir, ou plutôt supposer, de l'histoire du sanctuaire au IIe millénaire avant J.-C. doit nécessairement être induit de ce qu'on sait au Ier millénaire avant J.-C.
C'est ainsi que le premier chapitre est consacré à la redécouverte du sanctuaire par Carapanos, suivie, dans les plus brefs délais, de sa publication de 1878, et à l'histoire des fouilles postérieures, ainsi qu'à un bref rappel de ce qu'on sait déjà de l'histoire de Dodone. Le deuxième chapitre s'intéresse aux sources écrites, à savoir, d'abord, aux témoignages littéraires. Viennent ensuite les lamelles oraculaires: M. Dieterle a eu connaissance de ma thèse, soutenue en 2000, Les Lamelles oraculaires de Dodone (abrégé LOD), et maintenant publiée chez Droz, Genève 2006. Elle explique qu'elle n'a pas eu le temps d'intégrer les données de ce travail au sien propre, ce qui se comprend, et se contente, en appendice, de dresser une liste bibliographique de toutes les lamelles publiées à ce jour, où elle renvoie aux numéros de ma thèse avant publication, ainsi qu'à mes datations. Je dois préciser que, dans ma publication, la numérotation a changé, et que, si la liste de M. Dieterle comporte 191 numéros, alors que mon corpus en compte 167, avec quelques numéros bis, c'est que j'ai cru bon de négliger quelques fragments publiés, en particulier par Évangélidis, qui ne présentaient que quelques lettres insignifiantes. On relève des erreurs manifestes dans l'interprétation que propose M. Dieterle de plusieurs lamelles oraculaires: par exemple, son premier numéro (= LOD n° 98) n'est évidemment pas une consultation publique, mais la question d'un marchand qui s'interroge sur les avantages et les risques de faire du commerce avec Épidamne. La troisième et dernière partie de ce deuxième chapitre s'intéresse aux dédicaces, qui sont ici fort commodément regroupées pour la première fois.
Le troisième chapitre traite de l'architecture du sanctuaire de ca. 400 avant J.-C., date à laquelle apparaissent les premières constructions, à 167 avant J.-C., date des destructions de Paul-Émile en Épire. En 219 avant J.-C., le sanctuaire est ravagé par les Étoliens, puis assez rapidement reconstruit, et même embelli. Les explications se suivent facilement grâce à un excellent plan hors-texte et en couleurs, auquel on reprochera cependant de présenter comme des faits certaines hypothèses fort critiquables de Dakaris: à mon avis, en ce qui concerne les prétendus temples, seule l'identification du temple de Zeus Naios est assurée; tous les autres temples supposés, par exemple ceux de Diona, sont peut-être de simples trésors. Il vaudrait mieux, dans le plan, signaler par des points d'interrogation les identifications incertaines. On en dira autant du prétendu prytanée (cf. LOD n° 16).
Le quatrième chapitre s'intéresse aux trouvailles archéologiques datées du VIIIe au IVe avant J.-C., c'est-à-dire d'une période où le sanctuaire n'était pas construit: il s'agit d'objets votifs, souvent du plus grand intérêt artistique, surtout des objets en bronze, trépieds, statuettes divines, décorations de chaudrons et de cratères, assiettes votives, armes, miroirs, etc. Le cinquième chapitre concerne les trouvailles du IIe millénaire avant, et pose la question cruciale de la nature de ces trouvailles: s'agit-il d'objets profanes ou sacrés? Cette question en amène une autre: le sanctuaire est-il né au VIIIe siècle, ou existait-il déjà au IIe millénaire? Dans ce dernier cas, y a-t-il eu continuité du culte, ou renaissance? On saura gré à M. Dieterle d'avoir bien posé le problème, et d'avoir réuni les documents, même si les réponses proposées ne sont pas toujours convaincantes.
Un sixième chapitre consiste en une remarque finale sur le chêne de Dodone et son culte, mais la véritable conclusion sur les origines du culte à Dodone se trouve à la fin du chapitre V, 261-262: "Die hier entwickelte Theorie ergäbe folgendes Bild: Ursprünglich war der Ort Dodona durch eine Eiche ausgezeichnet, die den Platz zu einem Versammlungsort oder Orientierungspunkt werden ließ, belegt durch die Funde der früh- und mittelhelladischen Periode. In der Periode Späthelladisch III B ließen sich Menschen an der Stelle der Eiche nieder, ob aus religiösen Gründen oder aus wirtschaftlichen Erwägungen heraus, ist nicht zu klären. Die Fundobjekte lassen keine eindeutigen Aussagen darüber zu, obgleich die kreuzförmigen, plättchenartigen Bronzebeile 'kultisch' aussehen. Im Laufe der Zeit wurde die Eiche als eine Art 'Lebensbaum' stellvertretend für die lebenswichtigen Bereiche Regen und Erde als verehrungswürdig angesehen. Wann sich dieser Prozess vollzog und wie lange sich die daraus resultierende Vorstellung im Bewusstsein der Menschen hielt, bleibt offen. Jedenfalls scheint in homerischer Zeit eine Wiedererinnerung an diese Stätte stattgefunden zu haben, wodurch sie in das kulturelle Gedächtnis zurückgebracht wurde mit allerlei 'archaischen' Seltsamkeiten, wie beispielsweise die Sitte der Selloi, mit ungewaschenen Füßen auf der Erde zu schlafen."
Il ne saurait être question, ici, d'entrer dans les détails, mais nous devons dire que cette thèse ne parvient pas à nous convaincre. Il nous semble en particulier qu'on y a négligé les considérations ethniques: à date historique, Dodone est un sanctuaire dorien, et ce n'est qu'à cette date que nous est connue l'épiclèse Naios de Zeus. Homère l'appelle Zeus pélasgique, ce qui n'a pas le même sens que Pélasge. Selloi = Helloi = Hellanes. Etc. Il y a beaucoup plus, en ce qui concerne la préhistoire de Dodone, à tirer de la linguistique que le croit M. Dieterle.
Les appendices sont précieux: sources littéraires, avec le texte grec ou latin, et des traductions en langue moderne. On regrettera de n'y pas trouver le texte où il est question du passage de Julien l'Apostat à Dodone. Liste bibliographique des lamelles oraculaires publiées: signalons à ce propos que le nombre des lamelles oraculaires inédites s'élève à 4200! Liste des inscriptions votives. Liste des trouvailles archéologiques, qui rendra les plus grands services à ceux qui s'intéressent à l'archéologie de Dodone. La bibliographie est fort bien présentée et, semble-t-il, exhaustive. On en dira de même des index.
Éric Lhôte