Ralph Moffat (ed.): Medieval Arms & Armour: A Sourcebook. Volume I: The Fourteenth Century (= Armour and Weapons; Vol. 10), Woodbridge / Rochester, NY: Boydell & Brewer 2022, XXXIII + 317 S., 52 Farbabb., ISBN 978-1-78327-676-9, GBP 60,00
Inhaltsverzeichnis dieses Buches
Buch im KVK suchen
Bitte geben Sie beim Zitieren dieser Rezension die exakte URL und das Datum Ihres Besuchs dieser Online-Adresse an.
Joëlle Ducos / Hélène Biu: Émergences dune littérature militaire en français (XIIe-XVe siècle), Paris: Editions Honoré Champion 2022
Anne Curry / Rémy Ambühl (eds.): A Soldiers' Chronicle of the Hundred Years War. College of Arms Manuscript M 9, Woodbridge / Rochester, NY: Boydell & Brewer 2022
Allan V. Murray / Karen Watts (eds.): The Medieval Tournament as Spectacle. Tourneys, Jousts and Pas d'Armes, 1100-1600, Woodbridge: Boydell Press 2020
Si nous possédons déjà d'excellents ouvrages sur l'armement médiéval - études de cas ou livres de synthèse -, nous sommes loin de disposer de tous les outils nécessaires pour entreprendre des recherches approfondies dans ce domaine. La maîtrise du vocabulaire ancien reste un problème gênant; les dictionnaires se contentant généralement de renseigner tel ou tel vocable comme une arme ou une pièce d'armure, sans plus de précision. Cela n'est guère satisfaisant et l'idée de présenter un corpus de textes consacré à l'armement médiéval est très intéressante.
R. Moffat a donc sélectionné cent cinquante et un documents qui, à l'exception du statut des armuriers de Paris de 1296, datent tous du XIVe siècle. Ils peuvent être partagés en deux catégories. D'une part, les documents officiels qui ont une valeur juridique contraignante, tels que les testaments, les inventaires, les actes du Parlement, les plaintes et les enquêtes judiciaires, les statuts des métiers, la correspondance officielle ou commerciale ainsi que les lettres de défis aux duels judiciaires. D'autres part, un ensemble que l'auteur qualifie de "prose" et qui comprend les ouvrages religieux, les récits de chroniqueurs, les avis d'experts, les récits de voyageurs et les lettres de défi pour participer à des combats chevaleresques. L'éventail est large, mais la majorité des textes édités apparaissent sous la forme de listes, de comptes ou d'inventaires. Plus d'une centaine de ces documents proviennent de fonds d'archives insulaires (Angleterre et Ecosse). Une trentaine de France, une dizaine des Pays-Bas (principalement du comté de Hainaut), quelques-uns d'Italie et un de la Catalogne. L'Empire est donc largement ignoré. C'est fâcheux, mais compréhensible puisque tant l'auteur que l'éditeur sont britanniques. La transcription du document original, généralement en vieux français, est systématiquement accompagnée d'une traduction anglaise.
Si l'initiative est louable, certains choix de l'auteur nous laissent perplexes. Pour commencer, nous regrettons que R. Moffat ait choisi de présenter la transcription des archives par un texte continu, sans formatage, sans aucun signe de ponctuation et sans respecter les règles les plus élémentaires de l'édition des sources anciennes. La lecture en devient véritablement indigeste. Ensuite, l'auteur n'hésite pas à supprimer de sa transcription certains mots qu'il considère comme superflus (5). Nous comprenons qu'il soit parfois nécessaire d'amputer les documents trop longs plutôt que de les éditer dans leur intégralité, mais l'opération doit se faire en toute transparence. Lorsque nous parcourons les dispositions prises pour le duel entre le vicomte de Rohan et le seigneur de Beaumanoir (doc. n° 14), nous remarquons de très grandes différences entre l'édition ancienne (H. Morice, Mémoire pour servir de preuves à l'histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, I, Paris, 1742, col. 1222-1223) et celle de R. Moffat (49-51). Nous aurions aimé que l'auteur précise si la transcription de Morice est fautive ou si c'est lui qui a choisi de "condenser" le texte.
Enfin, certaines traductions sont maladroites. Nous pouvons lire le passage suivant dans un ancien manuscrit où se trouve le texte du statut des armuriers de Paris (doc. 1) : "que il n'i mètent escroe de tèle dont l'aune n'ait cousté viij den. au meins" (Paris, BnF, Mss Fr, 24069, f° 115). L'extrait est transcrit par R. Moffat en "que il ni metent escroe de tele dont laune nait contre viij d au meins" (35) pour être traduit par "that it be stuffed with strips of linen worth no less than eight deniers" (36). On notera les différences, la plus importante étant la disparition de la précision de longueur "l'aune" dans la traduction anglaise. Signalons encore que les documents sont livrés sans commentaire. Nous trouvons tout au plus une référence d'archive (ou d'édition lorsque la source ancienne a disparu), un titre et une date ; aucune explication soulignant l'importance du texte, aucun apparat critique destiné à faciliter la lecture et aucune bibliographie nous permettant d'approfondir notre recherche.
Un glossaire, accompagné d'une cinquantaine d'illustrations, permet au lecteur de mieux comprendre le sens de certains termes techniques liés à l'armement. Un index permet de naviguer plus facilement parmi les documents. Attention le Brabant n'est pas un comté, mais un duché (301).
Que le lecteur ne se méprenne pas. Les critiques formulées précédemment n'enlèvent pas tout mérite à l'ouvrage. Il reste une heureuse tentative de fournir aux chercheurs et aux passionnés un outil de travail très utile. C'est plus de deux cent cinquante termes liés à l'armement qui s'y trouvent consignés. Le corpus souligne la variété des sources exploitables et dévoile la richesse des informations qui y sommeillent. Il nous permet aussi d'identifier quelques armuriers ou des officiers chargés de superviser les armureries, de connaître certaines marques d'ateliers ou d'artisans, de recenser les ressources naturelles - qu'elles soient animales, végétales ou minérales -, utilisées lors de la fabrication des armes, etc. Toute personne intéressée par l'armement médiéval y trouvera son compte. Mais, le chercheur devra impérativement avoir recours à l'archive originale plutôt qu'à sa transcription ou sa traduction.
Bien que l'ouvrage ne soit malheureusement pas sans faiblesse, nous ne pouvons que nous réjouir du travail entrepris par R. Moffat et nous attendons avec impatience la publication du second volume. Nous espérons seulement qu'un plus grand soin sera apporté à l'édition des sources.
Sergio Boffa