Rezension über:

Tønnes Bekker-Nielsen (ed.): Space, Place and Identity in Nothern Anatolia (= Geographica Historica; Bd. 29), Stuttgart: Franz Steiner Verlag 2014, 271 S., ISBN 978-3-515-10748-8, EUR 49,00
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Rezension von:
Madalina-Claudia Dana
Université Paris I Panthéon-Sorbonne / ANHIMA Paris
Redaktionelle Betreuung:
Matthias Haake
Empfohlene Zitierweise:
Madalina-Claudia Dana: Rezension von: Tønnes Bekker-Nielsen (ed.): Space, Place and Identity in Nothern Anatolia, Stuttgart: Franz Steiner Verlag 2014, in: sehepunkte 14 (2014), Nr. 11 [15.11.2014], URL: https://www.sehepunkte.de
/2014/11/25184.html


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Tønnes Bekker-Nielsen (ed.): Space, Place and Identity in Nothern Anatolia

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Ce volume collectif, issu d'un colloque tenu en 2012 au Danemark, réunit treize contributions consacrées au nord de l'Anatolie. Il bénéficie de photographies et de cartes de très bonne qualité, ainsi que des index et d'une bibliographie consistants.

L'intention déclarée de l'éditeur est de rendre justice À une région moins étudiée par rapport aux espaces hellénisés de l'Asie Mineure méridionale et occidentale, sur une période allant de la chute de Mithridate VI Eupator (avec parfois des références antérieures) À l'époque byzantine. Le choix a porté sur l'intérieur du pays, car peu d'allusions sont faites au littoral peuplé par les Grecs depuis l'époque archaïque, et aucune étude de cas n'est consacrée aux cités de la côte sud-pontique. Si l'on doit cette préférence sans doute au fait que les anciennes fondations grecques ont déjÀ bénéficié d'une certaine attention dans les études pontiques, elle aurait cependant dû être expliquée. Par conséquent, l'intention des auteurs est de se concentrer sur une région caractérisée par une urbanisation récente, contrastant avec les établissements côtiers qui ont conservé leurs traditions grecques et avec d'autres régions micrasiatiques marquées par une forte poliadisation d'époque hellénistique. L'époque impériale est donc privilégiée, en raison également des sources qui s'enrichissent et se diversifient aussi bien pour la vie politique que pour les identités culturelles.

On peut dégager plusieurs thèmes, tout en respectant la réflexion proposée par l'éditeur dans l'introduction: espace et territoire du pouvoir, ethnicité et identité, espace urbain et identité, identité civique et identité locale, enfin espace religieux et territoire du sacré. Ainsi, E. Olshausen revisite la géographie du Pont selon Strabon, en mettant l'accent sur l'importance de l'"infrastructure" - mer, côte, montagnes, plaines - pour les populations, les dynastes et la province romaine de Pont-Bithynie. La dernière partie de cette synthèse est consacrée À la transformation en province et aux réorganisations successives du Pont romain. Cette étude sur le rapport entre territoire et pouvoir pourrait être complétée par la contribution méritoire de D. Burcu Erciyas sur une citadelle byzantine de Comana, si la discussion ne devait pas être déplacée À une autre époque. La comparaison est ainsi rendue difficile, vu les transformations apportées À la fois par les dominations successives et par les changements culturels.

Ces changements caractérisent par ailleurs le Pont depuis ses commencements, comme le montre B. McGing dans son étude sur l'identité culturelle dans le royaume du Pont. Après avoir passé en revue l'histoire de cet espace jusqu'À l'arrivée de Mithridate VI, il s'arrête sur les différentes facettes de ce dernier, À la fois protecteur des Grecs, nouveau Alexandre, mais aussi profondément attaché aux traditions anatoliennes. À côté de cette mise en perspective sur fond de toile politique, T. Bekker-Nielsen s'attache À des questions plus précises, en s'interrogeant sur l'identité paphlagonienne de la cité de Néapolis/Néoclaudiopolis, deux noms successifs pour la même cité. Selon les sources géographiques, son territoire appartiendrait À l'éparchie du Pont, sous l'autorité du gouverneur de la Galatie, alors que l'épigraphie et les monnaies suggèrent, À travers l'usage de l'ère régionale - la même que celle de Pompéiopolis, métropole de la Paphlagonie, et de Gangra -, un choix culturel. L'étude de N. Zwingmann sur Kelainai-Apamée Kibotos en Phrygie met en évidence de façon encore plus éclatante les identités emboîtées de cette fameuse cité, en se demandant, À juste titre, comment l'espace physique influence les récits, et comment, dans l'autre sens, ces récits ont façonné l'espace physique ou, du moins, sa perception. Il est vrai qu'avec ces trois systèmes de référence, Apamée Kibotos représente un cas singulier d'espace modeleur d'identités: cité À visages multiples, elle a été À la fois site royal pour les Perses et les Séleucides, terre grecque marquée par le mythe de Marsyas, enfin repère pour les communautés juive et chrétienne qui y ont placé l'arche de Noé (kibotos). Ces mythes issus des traditions variées sont employés, À l'époque de la Seconde Sophistique, pour affirmer la place proéminente de la cité dans la région.

L'identité est également au cœur des trois contributions qui s'interrogent sur les politiques urbaines dans l'Empire. La discussion une fois posée par L. Revell, qui traite de l'idéologie romaine de la ville et du rôle des élites dans le façonnage d'une colonie occidentale, Clunia Sulpicia (Hispania Tarraconensis), deux articles sont consacrés À proprement parler au nord de l'Anatolie. A. Zuiderhoek met en évidence la "matérialisation de l'idéologie", autrement dit, la manière dont l'espace urbain se transforme en paysage, puis en espace politique. L'urbanisme des cités d'Asie mineure est considéré par le prisme de la contribution des notables, la construction des divers bâtiments qui renvoient au mode de vie grec n'étant qu'une facette de leur évergétisme. Il aurait été utile de procéder À une analyse en miroir avec celle proposée par A.-V. Pont sur la fierté que les cités manifestent À l'égard de leurs ornements, mais aussi sur l'intégration dans le paysage urbain des innovations architecturales romaines. [1] V. Sauer ne se penche pas exclusivement sur l'espace urbain, comme son titre le laisse entendre, mais sur la façon dont les monnaies reflètent la transformation de l'espace en lieu délimité À l'intérieur de cet espace, À travers des références explicites (environnement naturel, espace construit, unités administratives) et implicites (nom de la cité, de l'empereur, événements, mythes).

Une attention particulière est accordée aux identités régionales, locales et civiques, par une série de trois contributions. Ainsi, M. Vitale s'attache À dégager une autoreprésentation de la cité et une construction de l'image de soi par les communautés pontiques. [2] Pour J. Majbom Madsen, il s'agit non pas de trancher la question de savoir si les cités fondées par Pompéi, après avoir divisé l'ancien royaume de Mithridate, sont des communautés grecques ou si elles portent l'empreinte de Rome, mais de se demander comment elles étaient perçues par les contemporains, en l'occurrence par Strabon, originaire d'Amaseia. Quant À J. Dalaison, après une présentation utile des transformations administratives subies par l'ancien royaume du Pont sous domination romaine, elle analyse l'iconographie des monnaies afin de mettre en évidence l'expression de l'identité civique dans le cadre assuré par l'Empire. Enfin, on peut évoquer les articles de C. G. Williamson, consacré au sanctuaire de Zeus Stratios près d'Amaseia, et de L. Summerer, qui donne une description de paysage religieux au nord de l'Anatolie. Si la dernière dresse un panorama provisoire, en raison de l'absence des fouilles, de treize lieux de culte, la première s'interroge sur la signification politique des sanctuaires des hauteurs. Ainsi, l'auteur montre le lien entre Zeus Stratios, la cité et les communautés du territoire: leur regard commun dirigé vers ce qui est À la fois lieu de mémoire et place du pouvoir participe À la construction de leur identité.

Pour conclure, on peut dire que le but déclaré de cet ouvrage est respecté: proposer une dialectique associant l'espace, les lieux et l'identité, montrer comment ces cités nouvelles construisent ou inventent des traditions, comment un espace géographique se transforme en espace culturel. Les synthèses sont solides, bien qu'attendues par endroits, une partie présentant par ailleurs des variantes abrégées d'autres contributions. On aurait souhaité, pour les identités culturelles, une enquête sur les "lieux de savoirs", nouvelles fondations mais centres culturels locaux. Néanmoins, il est certain que les auteurs, ainsi que l'éditeur, connaissent bien la région et y travaillent depuis assez longtemps pour en maîtriser les subtilités et les faire ressortir.


Notes:

[1] A.-V. Pont: Orner la cité: enjeux culturels et politiques du paysage urbain dans l'Asie gréco-romaine, Bordeaux 2010 (Scripta antiqua; 24).

[2] Voir À ce titre M. Dana: Culture et mobilité dans le Pont-Euxin. Approche régionale de la vie culturelle des cités grecques, Bordeaux 2011 (Scripta antiqua; 37), p. 339-393 ("La construction d'une identité culturelle régionale"), en partic. 386-392.

Madalina-Claudia Dana