John A. MacPhail Jr.: Porphyry's Homeric Questions on the Iliad. Text, Translation, Commentary (= Texte und Kommentare. Eine altertumswissenschaftliche Reihe; Bd. 36), Berlin: De Gruyter 2011, 310 S., ISBN 978-3-11-019543-9, EUR 98,00
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Porphyre avait écrit une œuvre en plusieurs livres intitulée Homerika zêtêmata (Quaestiones Homericae) dédiée à un certain Anatolius (sur ce personnage et ses probables homonymes, voir R. Goulet, s.v. Anatolius, in: DPhA I, 1989, 179-183 avec une discussion des témoignages). Porphyre avait rédigé les Quaestiones Homericae à la demande d'Anatolius sous forme de compte rendu des entretiens, au cours desquels il s'était engagé à trouver une solution (lysis) à certaines difficultés dans les poèmes d'Homère, sur le fondement du principe selon lequel Homère suffit à expliquer Homère (Homêros ex Homêrou safênizein). Les Quaestiones Homericae ne sont plus conservées (à part le livre I) dans leur intégralité, mais sous forme de scholies rapportées arbitrairement à un vers (ou groupe de vers) homérique(s) dans les marges des deux manuscrits Marcianus gr. 453 (XIe s. = B) et Escurialensis 509 (XIe s. = F) et de leurs apographes, sans tenir compte de la structure originaire de chaque zêtêma.
Une édition moderne complète des Quaestiones Homericae après celle de Schrader (1880 et 1890) fait partie des 'desiderata' des études 'porphyriennes'. A. Sodano avait consacré plusieurs études aux Quaestiones Homericae et avait publié le texte grec du livre I (1970) accompagné d'une traduction en italien (1973). Ce livre, le seul dans sa rédaction originale (mais incomplet), est transmis par le Vaticanus gr. 305, ff. 171r-184v (= V), copié dans la deuxième partie du XIIIe s. par Théophilacte Saponopoulos (et non au XIVe s.; voir F.M. Pontani, Eraclito Questioni Omeriche sulle allegorie omeriche in merito agli dei, Pisa 2005, 41-42). Sodano n'avait cependant pas envisagé une édition complète des nombreux extraits des Quaestiones Homericae.
John A. MacPhail Jr. a eu le courage et le mérite de s'engager dans une nouvelle édition des Quaestiones Homericae relatives à l'Iliade dans la redaction byzantine sous forme de scholies. Le texte grec, précédé d'une courte introduction (1-13) est accompagné d'un apparat, d'une traduction anglaise et de notes.
Dans la (trop) brève Introduction, MacPhail décrit en peu de mots la vie et les œuvres de Porphyre (1-3), présente le contenu du livre I des Quaestiones Homericae (3-6), donne un aperçu des extraits des Quaestiones Homericae transmis sous forme de scholies (6-8) et décrit les manuscrits B et F et leurs apographes en dessinant un stemma (8-10); il discute, enfin, les recherches sur les Quaestiones Homericae des travaux de Valckenaer à ceux de Sodano (10-12). Ces pages ne suffisent malheureusement pas pour donner une idée exhaustive de la vie de Porphyre ou des des graves problèmes de la structure, de la transmission et de la reconstruction des Quaestiones Homericae. De nombreuses fautes et coquilles en entravent de plus la lecture. J'ai déjà dit un mot à propos de la datation de V. A la p. 6 la phrase "After the original was published [...] on the margins of the manuscrits of Homer" est trop succincte et ne permet pas d'avoir une idée convenable du passage du texte des Quaestiones Homericae de leur forme originaire à celle des scholies. MacPhail n'explique pas non plus les critères qui l'ont porté à dessiner le stemma à la p. 10. Et encore: on comprendra ce que représente dans ce stemma le sigle 'chi' seulement en se reportant aux pages de Sodano 1970, XI-XXI (il s'agit de la 'Recension chi' des Quaestiones Homericae, c'est-à-dire celle transmise par les scholies de B et F). Il faut aussi remarquer: (11) la Vie d'Homère n'est pas de Plutarque; (11 n. 74) lire 'Gildersleeve 1853, 7-8' au lieu de 'ibid. 7-8'; (11 n. 80) voir aussi le livre de Pontani sur Héraclite (cité plus haut); (12) à part la coquille 'Erbese' pour 'Erbse', on regrette l'absence de toute discussion de l'édition des Quaestiones Homericae qu'on lit dans le recueil des fragments de Porphyre d'A. Smith (1973), 467-478, fr. 384F-402F. Venons-en à la liste des Abréviations et des sigles (13): après 'Victorianus', il faut ajouter 'Monacensis gr. 16 (XVI s.)'; la date de la sixième édition de D-K est 1951-2; les TrGF ont été publiés à Göttingen. Enfin, on n'y trouve pas le sigle 'omega' qu'on lit dans les apparats. Encore une fois, il faudra revenir à l'introduction de Sodano (1970, IX-XXXIV) si l'on veut avoir une description des témoins et une présentation des Quaestiones Homericae, de leur transmission et des problèmes ecdotiques qui y sont liés. Dans les pages de Sodano on trouvera aussi une discussion ponctuelle des variantes utiles pour dessiner le stemma (XXXIV) d'une façon plus complète et lisible.
L'édition de MacPhail représente un progrès évident par rapport à celle de Schrader et la traduction aide considérablement le lecteur. Dans l'établissement du texte, j'ai cependant l'impression que l'éditeur (ou ses collègues) ont eu souvent tendance à normaliser la grammaire et la syntaxe. Il y a dans ces pages, encore une fois, quelques coquilles (déjà signalées par P. W. van der Horst, BMCR 2011.06.02) et l'identification des 'loci' cités par Porphyre n'est pas toujours exacte ou complète. Voir, par exemple: p. 34 - Arist. fr. 142 R(ose)3 = 366 G(igon), à lire maintenant avec les remarques de R. Janko, Philodemus On poems Books 3-4, Oxford 2011, 322 n. 4; p. 76 - Arist. fr. 148 R3 = 372 G; p. 82 - Arist. fr. 150 R3 = 374 G; p. 84 - Arist. fr. 152 R3 = 376 G; p. 88 et 90 - Zoilus, FGrHist 71F 7 et 8; p. 100 - Arist. fr. 153 R3 = 377 G; p. 112 - Antimachus fr. 80 Matthews; p. 114 - Arist. fr. 155 R3 = 379 G; p. 126 - Arist. fr. 157 R3 = 381 G; p. 136 - Soph. fr. 662 Radt2; p. 152 - Nessas D-K 69 B 1 (dans l'apparat à la l. 6, la conjecture proposée par Janko avait été déjà avancée par Diels); p. 168 - Arist. fr. 159 R3; p. 174 - Arist. fr. 161 R3 = 385 G; p. 178 - Zoilus, FGrHist 71F 9; Mégaclidès fr. 11 Janko, Philodemus, On poems Book 1, Oxford 2000, 143 n. 3 (cf. 141 n. 4 à propos du Schol. Hom. Il. 16, 140, "probably from Porph. Quaest. Hom."); p. 188 - (Aristote) deest in R3 et G; p. 212 (Aristophane) - fr. 261 K.-A. (cf. QH Od. 7, 23 Schr.); p. 256 - Arist. fr. 164C R3 = 388 G; p. 260 (Aristote) - fr. 389 G.
En dépit du titre, il n'y a pas de commentaire, mais seulement quelques notes à la traduction.
Une bibliographie (289-293) ainsi que trois index (des sources, des passages cités, des mots homériques) suivent (295-310). Dans la bibliographie les titres en italien sont souvent massacrés: (Brancacci) 'di'; (Castelletti) 'sullo'; (Sodano) 'Questioni omeriche', 'metodologia' (bis), 'Aristotele', 'Questiones Homericae'; 'Ann(ali) Pontificio Ist(ituto)...' et non 'Ann(ali) Pontificio 1st' (sic, bis). Et non seulement: (Califf) 'Lampsacus'; (Römer) 'exegetischen'; il manque l'entrée 'Goulet 1982a' tandis que l'entrée 'Goulet 1982b' est attribuée à Gorman; il n'y a pas d'entrée 'Rose3' et l'entrée 'Schlunk' est répétée deux fois.
Il serait injuste de fonder le jugement de cette édition en tenant compte seulement des erreurs et des coquilles que je viens de signaler. MacPhail a beaucoup travaillé, a collationné les manuscrits des scholies, a établi une nouvelle édition de ces textes difficiles et en a proposé une traduction anglaise. De tout cela il faut lui être reconnaissant. Il ne reste qu'à espérer que s'il prépare une 'seconde édition' des Quaestiones Homericae à l'Iliade et aussi (on le souhaite vivement) une des Quaestiones Homericae à l'Odyssée il sera plus scrupuleux et lira les épreuves avec plus d'attention.
Tiziano Dorandi