Kerstin Droß-Krüpe / Sebastian Fink (eds.): Powerful Women in the Ancient World. Perception and (Self)Presentation. Proceedings of the 8th Melammu Workshop, Kassel, 30 January - 1 February 2019 (= Melammu Workshops and Monographs; Vol. 4), Münster: Zaphon 2021, 586 S., zahlr. Abb., ISBN 978-3-96327-138-0, EUR 125,00
Inhaltsverzeichnis dieses Buches
Buch im KVK suchen
Bitte geben Sie beim Zitieren dieser Rezension die exakte URL und das Datum Ihres Besuchs dieser Online-Adresse an.
Cet ouvrage est le résultat du 8ème atelier Melammu intitulé «(Self-)Presentation and Perception of Powerful Women in the Ancient World», qui s'est tenu à Kassel du 30 janvier au 1er février 2019. C'est la première fois qu'un Melammu Workshop est entièrement consacré aux femmes antiques et comme il est d'usage dans ces ateliers, l'accent est mis sur l'interdisciplinarité. En effet, l'horizon géographique retenu est très large puisque les différentes figures féminines abordées dans cet ouvrage sont issues du Proche-Orient ancien, de l'Égypte ancienne et de la Nubie, du monde biblique ainsi que des mondes grec et romain. L'époque retenue est elle aussi très large puisque les femmes étudiées couvrent près de trois millénaires d'histoire. La diversité des sujets repose également sur l'étude d'une pluralité de documents : textes cunéiformes et hiéroglyphiques, sources classiques, iconographiques, numismatiques, etc. C'est d'ailleurs ce qui fait l'originalité et la richesse de cet ouvrage puisque la thématique des femmes de pouvoir n'est en soit pas une nouveauté, celle-ci ayant déjà fait l'objet de diverses études ponctuelles et récemment de quelques ouvrages collectifs cités par les éditeurs (12).
L'ouvrage est organisé en deux sections de tailles inégales: la première, intitulée «Powerful Women in the Ancient World in the Light of the Sources», regroupe 21 contributions. Les études de cas se succèdent selon un ordre chronologique et géographique. La seconde section, qui ne contient quant à elle que trois articles, s'intitule «Powerful Women in the Ancient World in Modern Thought». Celle-ci s'intéresse à la réception de certaines femmes d'exception de l'Antiquité - en particulier Cléopâtre VII et Zénobie -, aux époques postérieures et à travers différents témoignages.
Comme l'indique le titre de l'ouvrage, ce ne sont pas toutes les femmes antiques qui ont retenu l'attention des spécialistes mais les «Powerful Women». Reste à définir ce que l'on entend à travers cette expression. Femmes de pouvoir, fortes, influentes, dirigeantes, certes mais dans quels domaines, milieux et sphères de compétences? La réponse nous est donnée par les éditeurs, Kerstin Dross-Krüpe et Sebastian Fink, dans leur introduction (9): le pouvoir est entendu dans son sens le plus large (exercice du pouvoir ou influence dans la sphère politique, économique, religieuse ou en privé). Ainsi, qu'il s'agisse de femmes historiques ou issues de la mythologie, qu'elles aient été reines ou régente d'un État ou simplement des femmes influentes au sein de leur famille ou d'une communauté, qu'elles aient exercé un réel pouvoir ou qu'elles aient usé de leur influence dans des réseaux privés, peu importe. Toutes font partie, pour les éditeurs, de la catégorie des «Powerful Women».
Ainsi au fil des pages, le lecteur découvre ou redécouvre diverses femmes aux parcours et aux destins exceptionnels. Des reines et des princesses, des épouses et des filles d'empereurs, de divers états et de diverses époques sont abordées parmi lesquelles Hatchepsout, Amanishakheto, Bethsabée, Laodice, Olympias et sa fille Cléopâtre, Livie, Julie, Messaline, Julia Domna, Zénobie, Shirin, Antigone ou encore Ada. D'autres, comme Elpinice et Cornelia, appartiennent à des familles influentes dont certains hommes exercent un pouvoir politique. D'autres enfin sont des divinités ou sont des femmes qui agissent individuellement ou collectivement dans le domaine religieux: Innana, Enheduana, Shamhat, Mélanie la Jeune, ou encore les femmes prophètes et les femmes au cœur du système tribal du monde biblique.
Toujours selon les éditeurs, diverses questions devraient avoir orienté la réflexion générale. Par exemple: sur la base des sources disponibles que sait-on du rayon d'action réel de ces femmes, de leur statut social et économique? Ces femmes ont-elles été considérées comme des modèles et si oui à quelle époque et par qui? Le rôle attendu d'une femme puissante était-il différent dans les mondes classique et mésopotamien? Et enfin quelles réactions ces femmes puissantes ont-elles provoquées sur leurs contemporains ou à des époques successives? Des questions somme toute assez générales auxquelles les contributions ne répondent pas toujours. Ceci s'explique certainement par la diversité des sujets, des approches, des méthodes et surtout des sources disponibles. Outre la variété des sujets, le lecteur sera aussi surpris par un manque d'uniformité dans la présentation des contributions. En effet, certaines études sont particulièrement longues et proposent une analyse détaillée (Annette Zgoll, David A. Warburton, Josefine Kuckertz), tandis que d'autres au contraire sont synthétiques (Paola Corò, Francesca Rohr Vio). De même, certains articles sont précédés d'un résumé (499), d'autres d'un plan (14). Pour ce qui est des sources écrites, là encore aucune règle ne semble avoir été imposée aux chercheurs: certains proposent des éditions accompagnées de traductions modernes, d'autres ne fournissent qu'une traduction.
Au terme de ce parcours passionnant et complexe, on regrettera toutefois l'absence d'une synthèse générale. Celle-ci aurait permis de rappeler les principaux enjeux et résultats obtenus, mais surtout de tisser des liens entre les divers dossiers étudiés. Une telle synthèse est particulièrement souhaitable lorsque le champ d'étude est si vaste et les dossiers si riches et différents les uns des autres. La sélection des figures féminines abordées dans cet ouvrage aurait aussi mérité une explication un peu plus approfondie de la part des éditeurs car il n'est pas toujours aisé pour le lecteur d'entrevoir un fil conducteur entre toutes ces «Powerful Women». D'ailleurs cette expression a récemment été discutée dans un ouvrage collectif qui semble méconnu des éditeurs. [1] Dans celui-ci, qui se concentre certes sur l'époque hellénistique et romaine, les éditrices ont préféré l'expression de «femmes influentes» à celle de «femmes de pouvoir» tant le pouvoir ou l'influence exercée par certaines femmes est différent d'un cas à un autre et tant il peut apparaître parfois comme un phénomène marginal dans des sociétés profondément patriarcales.
Note:
[1] Anne Bielman Sánchez / Isabelle Cogitore / Anne Kolb (dir.): Femmes influentes dans le monde hellénistique et à Rome (IIIe siècle avant J.-C. - Ier siècle après J.-C.), Grenoble 2016.
Lara Dubosson-Sbriglione